Immigration : l'Aide médicale d'État rétablie en commission par les députés qui reviennent sur le vote des sénateurs

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Florent Boudié LCP 29/11/2023
La commission des lois de l'Assemblée nationale a rétabli l'AME (© LCP)
par Raphaël Marchal, le Mercredi 29 novembre 2023 à 21:28, mis à jour le Mercredi 29 novembre 2023 à 23:49

Les députés ont rétabli en commission, à une très grande majorité, l'Aide médicale d'Etat (AME), supprimant un article du Sénat qui visait à la transformer en une simple Aide médicale d'urgence, dans le cadre du projet de loi immigration.

C'était l'un des points les plus clivants du projet de loi "pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration", dans sa version transmise par le Sénat. Ce mercredi 29 novembre, les députés de la commission des lois ont rétabli à une grande majorité l'aide médicale d'État (AME) pour les étrangers en situation irrégulière. L'article du Sénat qui transformait cette AME en aide médicale d'urgence, moins-disante, a été supprimé du texte.

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La disposition votée par les élus du Palais du Luxembourg, où la droite et le centre sont majoritaires, a fédéré contre elle les députés de la majorité présidentielle, les députés de gauche, ainsi que ceux du groupe Libertés, indépendants, Outre-mer et territoire (Liot). La suppression de l'article introduit par le Sénat ne faisait guère de doute, le gouvernement et sa majorité ayant d'emblée affiché leur fermeté en la matière.

"Ce n'est pas simplement une question de santé des individus, mais c'est aussi une question de santé collective", a argumenté le rapporteur général du texte, Florent Boudié (Renaissance), qui ouvert la présentation d'une série d'amendements de suppression. "La suppression de l'AME n'a rien à faire, ni dans ce texte, ni dans aucun autre", a renchéri le président de la commission des lois, Sacha Houlié (Renaissance).

"C'est un cavalier législatif évident", et à ce titre largement susceptible de subir la censure du Conseil constitutionnel, a ajouté Gérald Darmanin. Le ministre de l'Intérieur a également marqué sa désapprobation quant au fait de toucher à l'AME, alors que le tandem Patrick Stefanini et Claude Evin doit rendre un rapport sur le sujet dans les prochains jours. Au-delà de son principe, le débat sur le contour exact de ce dispositif, qui a bénéficié à plus de 380 000 personnes en 2023, n'est donc peut-être pas totalement clos.

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Les élus de gauche n'ont pas eu de mots assez forts pour exprimer tout le mal qu'ils pensaient de l'initiative sénatoriale. "Indigne moralement", a grondé Boris Vallaud (Socialistes). "Il y a là un enjeu d'humanité et de santé publique qui ne peut pas être l'objet d'une instrumentalisation politique", a tancé Élisa Martin (La France insoumise). "C'est proprement scandaleux", s'est émue Elsa Faucillon (Gauche démocrate et républicaine).

Au contraire, les députés Les Républicains et Rassemblement national ont défendu la disposition votée au Sénat. "Un tiers des Français ont déjà renoncé à des soins faute de moyens. [...] Pendant ce temps, le nombre de bénéficiaires de l'AME augmente", s'est agacé Yoann Gillet (RN), qui a mis en avant le coût du dispositif, 1,3 milliard d'euros en 2024 - soit 0,5 % du budget de la Sécurité sociale. "Comment peut-on comprendre qu'on ne peut pas écarter des opérations telles que recollement des oreilles décollées, gastroplastie, ou intervention liée à l'obésité ? Ceci n'est plus compris par nos concitoyens", a pour sa part plaidé, sans succès, Véronique Louwagie (LR).

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La commission des lois a achevé d'examiner les articles ajoutés par le Sénat en préambule du projet de loi originel. Supprimant certaines modifications qui avaient durci le texte, ou retouchant seulement plus à la marge certaines d'entre elles, le gouvernement et sa majorité - qui n'est pas absolue à l'Assemblée nationale - cheminent ainsi sur une ligne de crête, qui leur permettrait de rééquilibrer le projet de loi et d'obtenir le soutien ou l'abstention de suffisamment de députés d'opposition pour réussir à le faire voter. Ce mercredi soir, la commission des lois examine des mesures destinées à favoriser l'intégration.