Salles de consommation à moindres risques : des députés prônent la pérennisation de l'expérimentation

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Caroline Janvier salles de shoot
par Soizic BONVARLET, le Mardi 14 septembre 2021 à 14:58, mis à jour le Mercredi 15 septembre 2021 à 09:26

La mission-flash menée par Caroline Janvier (La République en marche) et Stéphane Viry (Les Républicains) a commencé ses travaux en juillet et effectué plusieurs auditions avant de se rendre dans les salles de consommation à Paris et à Strasbourg. Les co-rapporteurs pointent l'efficacité des ces lieux en termes de réduction des risques, tout en insistant sur la nécessité d'inscrire leur existence dans un dispositif de soins plus global.

Caroline Janvier (La République en marche) l'a précisé dès son préambule, il ne s'agit ni pour elle, ni pour son collègue Stéphane Viry (Les Républicains), de prendre part à la polémique liée au projet adopté en Conseil de Paris, d'inaugurer une nouvelle salle de consommation à moindres risques (SCMR) dans le 20ème arrondissement. Et pour cause, l'ouverture de ce type de lieux, communément appelés "salles de shoot", doit selon les députés impérativement se faire dans un travail de concertation avec les élus de terrain et les acteurs de l'État, en tenant compte de la spécificité de chaque territoire. Si les deux co-rapporteurs se retrouvent sur le bien-fondé de ces salles destinées aux usagers de drogues, elles ne peuvent être efficientes qu'"au cas par cas", selon le député Les Républicains, qui estime nécessaire la recherche d'un "consentement territorial", et se refuse à une quelconque "ingérence dans une volonté politique de la Ville de Paris".

Des enjeux sanitaires et de réinsertion sociale

"Ce n'est pas à nous de dire s'il faut plus ou moins de salles dans Paris", considère ainsi Caroline Janvier qui note néanmoins un succès du dispositif, qui permet d'ajouter une dimension sanitaire à la gestion sécuritaire de la toxicomanie sur la voie publique. Des usagers de drogues dont la mission est allée à la rencontre et qui témoignent à propos de ces salles d'"une porte d'entrée vers tout un parcours de réinsertion". Caroline Janvier cite l'exemple de la salle située sur le site même de l'Hôpital Lariboisière, dans le 10ème arrondissement parisien, où deux usagers ont noué des contrats d'insertion auprès de la structure. quand à Strasbourg c'est, par exemple, la possibilité d'un hébergement temporaire de vingt places qui est proposée aux personnes sans-abri.

Stéphane Viry n'a pas hésité à admettre que "le but des SCMR n'est effectivement pas de sevrer les toxicomanes qui y sont reçus". En revanche, elles permettraient "d'inclure dans un dispositif de soins des personnes qui en étaient totalement éloignées". "Il ne faut surtout pas en faire un marqueur politique, un totem idéologique", a déclaré le député Les Républicains. "Limiter les pratiques à risques est un premier pas". a-t-il ajouté, avant de réitérer la demande d'une "réponse plus globale" de la part des pouvoirs publics.

Prendre en compte la parole des riverains

Ayant également rencontré les riverains des salles de Paris et de Strasbourg, les députés qui ont mené les travaux de la mission-flash notent que si certains collectifs sont farouchement opposés à leur présence au sein de leur environnement, certains considèrent aussi que ce salles ont permis d'apaiser, voire de sécuriser leurs quartiers, en mettant notamment fin aux "scènes ouvertes de consommation de drogues". De même, beaucoup ont constaté le retour de seringues souillées sur la voie publique à la faveur du premier confinement, alors que les salles de consommation à moindres risques avaient dû pour un temps fermer leurs portes. Des effets bénéfiques qui peuvent être occultés par les nuisances dénoncées par les résidents des immeubles au plus près de ces lieux. Raison de plus pour Caroline Janvier et Stéphane Viry, d'insister sur l'enjeu de concertation primordial avec l'ensemble des acteurs publics et locaux.

Caroline Janvier, qui est, par ailleurs, favorable à la légalisation encadrée du cannabis récréatif, ne souhaite cependant pas lier les deux problématiques. "Le Portugal l'a fait, avec un certain succès, puisque la consommation de cannabis est trois fois moins importante qu'en France, et celle de drogues dures divisée par deux", mais la députée du Loiret pense qu'il faut pouvoir opérer une distinction nette entre le cannabis "moins addictif que le tabac et l'alcool", et les drogues dites "dures".

Les co-rapporteurs ont d'ores-et-déjà indiqué que les préconisations de la mission pourraient trouver une traduction dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Ce dernier contiendra en effet des dispositions relatives aux SCMR, afin que l'expérimentation de celles-ci, autorisée pour une durée de six ans par la loi du 26 janvier 2016 sur la modernisation du système de santé, puisse être pérennisée.