Projet de loi immigration : commission mixte paritaire, mode d'emploi

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par Soizic BONVARLET, le Mercredi 13 décembre 2023 à 17:31, mis à jour le Mercredi 13 décembre 2023 à 17:55

Pour tenter de sauver le projet de loi sur l'immigration, l'exécutif a choisi l'option de la commission mixte paritaire (CMP). Lundi 18 décembre, cette instance composée de 7 députés et 7 sénateurs tentera d'établir un texte de compromis qui - en cas d'accord -, devra ensuite être approuvé par l'Assemblée nationale et le Sénat.

Après la motion de rejet préalable adoptée par une majorité de députés, toutes oppositions confondues, lundi 11 décembre, l'exécutif a choisi la voix de la commission mixte paritaire (CMP) pour permettre au projet de loi sur l'immigration de poursuivre son parcours législatif et, éventuellement, d'être adopté. 

C'est dans ce cadre que sept députés et sept sénateurs se réuniront lundi 18 décembre, pour tenter de s'accorder sur un texte de compromis qui conviendrait aux deux Chambres du Parlement. Comme toujours, cette réunion aura lieu à huis clos, pour favoriser une discussion sereine plus susceptible d'aboutir à un accord, et fera ensuite l'objet d'un compte rendu public. Cette instance peut être convoquée à l'initiative de Matignon, ou de façon conjointe par la présidence des deux Chambres du Parlement lorsqu'il s'agit d'une proposition de loi. 

La commission mixte paritaire relève d'une procédure courante de la vie parlementaire, prévue à l'article 45 de la Constitution, visant, en cas de désaccord ou de blocage entre les deux Chambres, à "proposer un texte sur les dispositions restant en discussion". Fait plus inédit en revanche, suite au vote de la motion de rejet préalable, les députés n'ont pas examiné dans l'hémicycle le texte qui fera l'objet de la CMP. C'est donc sur la base du texte adopté par le Sénat le 14 novembre dernier que les parlementaires aborderont leurs débats.

Une composition respectueuse des équilibres politiques du Parlement

Les commissions mixtes paritaires sont constituées en fonction de l'effectif des différents groupes politiques - proportionnellement au nombre de leurs élus -, au sein de l'Assemblée et du Sénat. Chaque CMP est composée de sept députés titulaires et sept députés suppléants, ainsi que de sept sénateurs titulaires et sept sénateurs suppléants. Quatorze parlementaires, les titulaires sauf empêchement, sont donc chargés d'essayer de se mettre d'accord sur un texte commun aux deux Chambres. 

En termes de grands équilibres, le contingent de l'Assemblée nationale comprend quatre élus de la majorité présidentielle et trois des oppositions, tout comme le contingent du Sénat comprend quatre représentants de la majorité de droite et du centre et trois des oppositions sénatoriales.  

  • Pour l'Assemblée nationale :
    - 3 députés Renaissance 
    - 1 député Démocrate
    - 1 député Rassemblement national
    - 1 député La France insoumise
    - 1 député Les Républicains 
  • Pour le Sénat :
    - 3 sénateurs Les Républicains 
    - 1 sénateur Union centriste
    - 2 sénateurs du Parti socialiste 
    - 1 sénateur Renaissance (RDPI)

Un accord éventuel qui devra être validé par les deux Chambres

Si un accord est trouvé par la commission mixte paritaire - qui est alors dite "conclusive" -, celui-ci devra être approuvé en séance publique à l'Assemblée nationale et au Sénat pour que le texte soit adopté par le Parlement. L'objectif du gouvernement est d'obtenir un vote favorable avant Noël dans chacune des deux Chambres. A l'Assemblée nationale, le gouvernement peut cependant avoir recours au 49.3 - comme cela avait été le cas sur la réforme des retraites -, au risque de s'exposer à une motion de censure. 

L'exécutif, comme la majorité présidentielle, semblent cependant vouloir aboutir par un vote. "Je ne suis pas favorable à l'utilisation du 49.3 sur le projet de loi immigration", a notamment déclaré la présidente de l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet (Renaissance), mercredi 13 décembre, sur France 2. Si l'Assemblée et le Sénat approuvent le texte issu de la CMP, le projet de loi sur l'immigration sera alors définitivement adopté par le Parlement. 

Sans accord en CMP, la navette parlementaire entre le Sénat et l'Assemblée pourrait reprendre et le dernier mot revenir à l'Assemblée avec les incertitudes inhérentes à la composition du Palais-Bourbon, n'offrant aucune garantie au gouvernement, comme l'a montré le vote de la motion de rejet lundi. Mais l’Élysée semble, à ce stade, privilégier un quitte ou double : accord en CMP et vote favorable dans les deux Chambres avant Noël, ou rien.  

Alors que la présidente de l'Assemblée avait indiqué, mercredi matin, que la réunion se tiendrait "probablement lundi ou mardi", quelques heures plus tard le président de la commission des Lois, Sacha Houlié (Renaissance), - à qui revient la charge d'organiser le travail la CMP, voulue par le gouvernement, avec son homologue du Sénat-, a précisé qu'elle aurait lieu lundi 18 janvier à 17h, au Palais-Bourbon. 

"[La commission mixte paritaire] se met au travail informellement dès aujourd'hui", a expliqué Yaël Braun-Pivet sur France 2, ajoutant : "un accord se prépare : les discussions vont commencer entre les rapporteurs, présidents de commissions du Sénat et de l'Assemblée nationale".

Alors que seuls les parlementaires siègent au sein de la CMP, les concertations ont d'ores-et-déjà commencé avec le gouvernement, la Première ministre, Elisabeth Borne, s'entretenant successivement à Matignon, ce mercredi, avec les représentants des groupes politiques de la droite et du centre ainsi que les représentants des groupes de la coalition présidentielle. Des discussions qui se poursuivront jeudi, avant la réunion de la commission mixte paritaire qui aura lieu lundi.