Le Premier ministre a obtenu la confiance de l'Assemblée nationale mercredi. Le nouveau chef du gouvernement, nommé il y a douze jours, a confirmé et détaillé les grands chantiers ébauchés par Emmanuel Macron le 14 Juillet. Au menu du discours prononcé par le Premier ministre ; plan de relance de l'économie et de l'industrie, croissance écologique, mise en avant des territoires, soutien à l'emploi des jeunes, lutte contre l'insécurité et projet de loi contre "les séparatismes",
Le nouveau locataire de Matignon a tenu à saluer le bilan des trois années d'Edouard Philippe à la tête du gouvernement, avec un geste appuyé à destination de la majorité. "Face à la crise nous avons tenu bon collectivement !, assure Jean Castex. L'histoire se souviendra des réformes ambitieuses qu'il a menées avec le soutien sans faille de la majorité que je salue !"
Le Premier ministre, qui a confirmé qu'il n'y aura "pas d'effort fiscal supplémentaire" demandé aux Français, a souligné devant les députés sa volonté d'une relance en faveur de l'industrie et des nouveaux secteurs d'avenir, tout en défendant une "croissance écologique" qui serait "créatrice de richesses" a contrario de la "décroissance verte".
Ce plan de relance sera un accélérateur puissant de la transition écologique. Ce gouvernement veut gagner la bataille pour le climat. (...) Faire de l'économie française l'économie la plus décarbonée d'Europe Jean Castex Premier ministre
Le chef du gouvernement souhaite également axer son action sur la création d'une croissance française plus "robuste" avec un plan de relance lancé "dès le début du mois de septembre" pour un total de 100 milliards d'euros.
Face aux faiblesses de l'appareil productif de la France, en comparaison de l'Allemagne, révélées par la crise sanitaire, l'exécutif promet de réagir : "Il faut transformer notre appareil productif. (...) Nous sommes aujourd'hui trop dépendants de nos partenaires extérieurs et insuffisamment présents sur certains secteurs stratégiques !"
40 milliards d'euros des 100 milliards d'euros promis devraient être fléchés sur cet objectif.
Le patronat français, au premier rang duquel le Medef, n'a eu de cesse ces derniers mois de réclamer une baisse des "impôts de production" des entreprises comme la C3S (Contribution sociale de solidarité des sociétés) sur le chiffre d'affaires des entreprises, ainsi que d'autres impositions dont beaucoup financent les collectivités locales. Le Premier ministre a répondu favorablement à cette demande de baisse les impôts de production qui pourrait atteindre 20 milliards d'euros.
Dans sa boîte à outils figure également le retour d'un commissariat général au Plan. Une manière de réapprendre à se "projeter dans le long terme", justifie-t-il. Une organisation du développement économique qui ira de pair avec un investissement de 25 milliards d'euros dans la recherche publique sur la prochaine décennie
Tout au long de son intervention, l'ancien maire de Prades (Pyrénées-Orientales) – qui a quitté son mandat, après avoir été réélu, lors de sa nomination à Matignon – a rappelé la nécessité d'une politique nationale qui prend en compte "tous les territoires et toutes les France" qui cohabitent dans la République française.
La crise est venue frappée une France en plein doute, une France qui se divise, une France qui se crispe, et qui parfois se désespère. (...) Une France qui se sent parfois abandonnée. France des banlieues, France rurale, France des Outre-mer, France dite périphérique ! Jean Castex, Premier ministre
Le chef du gouvernement a promis de favoriser les relations et la coopération entre les maires et les préfets des 101 départements français en insistant sur l'importance de l'échelon départemental.
A la suite des 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat, rassemblant 150 citoyens volontaires et tirés au sort, Jean Castex a annoncé 20 milliards d'euros pour la rénovation thermique des bâtiments et les technologies vertes. Il a aussi évoqué un plan en faveur du vélo et promis un moratoire sur les projets de centres commerciaux en zone périphérique des grandes villes.
"A nous de concilier transition écologique et pouvoir d'achat", défend le Premier ministre par un accompagnement de l'État :
Le chef du gouvernement a également affirmé qu'il profiterait de la transformation du Conseil économique, social et environnemental pour valoriser la "démocratie directe", à laquelle aspirent "les citoyens de plus en plus".
Conformément à la volonté présidentielle, Jean Castex compte relancer la réforme des retraites, du moins partiellement. Il a évoqué "la disparition à terme des régimes spéciaux" et maintenu l'objectif d'un "régime universel". Mais il a distingué cette réforme qui reste, selon lui, "nécessaire" des "mesures financières appelées parfois paramétriques", alors que la question de l'âge d'équilibre avait contribué à crisper les discussions avec les partenaires sociaux.
Afin de donner un coup de pouce aux ménages avec enfants et aux plus modestes, le Premier ministre a dévoilé une hausse "exceptionnelle" de la prime de rentrée scolaire.
Il a aussi annoncé des repas à un euro pour les étudiants boursiers dans les restaurants universitaires.
Le plan pauvreté, lancé il y a deux ans par le gouvernement, doit également être "poursuivi et amplifié", avec des modalités qui doivent encore être précisées.
Le locataire de Matignon a aussi mis l'accent sur la sécurité des Français. Il a déploré "la banalisation de la violence du quotidien" que insisté sur "la lutte contre l'islamisme radical". Celle-ci doit "demeurer une de nos préoccupations majeures", a-t-il souligné.
Évoquant le "pacte républicain", il a annoncé un projet de loi "contre les séparatismes" pour "éviter que certains groupes ne se referment autour d'appartenances ethniques ou religieuses" :
Si le gouvernement Castex a reçu le soutien des députés de la majorité, les groupes d'opposition ont émis de nombreux doutes sur les orientations proposées par le Premier ministre.
À droite, Damien Abad (LR) a fustigé un gouvernement qui manquait de cohérence et qui n'était de droite qu'en apparence, refusant ainsi de voter la confiance :
À gauche, les trois principales formations (PS, PCF et LFI) ont également refusé de voter favorablement. Quand Jean-Luc Mélenchon juge la planification promise par le gouvernement (et voulue par La France insoumise) comme une annonce sans consistance, Valérie Rabault estime notamment que les annonces sur la jeunesse (exonérations de charges sur les salaires inférieures à 1,6 Smic) sont loin du compte :
Vous ne mettez en place aucun filet de sécurité pour la jeunesse, qui n'a le droit ni au chômage (...), ni au RSA (...), ni même à l'aide à la recherche du premier emploi que nous avions créée (...) et que vous avez supprimée en 2019 Valérie Rabault
La déclaration de politique générale de Jean Castex a été largement approuvée par l'Assemblée nationale avec 345 voix "pour", 177 "contre" et 43 abstentions. Une adhésion toutefois moindre que pour les gouvernements d'Edouard Philippe. L'ancien Premier ministre avait recueilli 370 votes favorables en juillet 2017 pour sa première déclaration de politique générale et 363 en juin 2019 pour la seconde.