Crise des sous-marins : sans commission d'enquête, quel travail de contrôle à l'Assemblée ?

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par Ariel Guez, le Mardi 21 septembre 2021 à 13:24, mis à jour le Mercredi 22 septembre 2021 à 18:25

Malgré les demandes de plusieurs députés d'opposition, aucune commission d'enquête sur la crise des sous-marins avec l'Australie ne sera créée à l'Assemblée nationale. Tous les groupes d'opposition ont déjà usé de leur "droit de tirage" et la majorité préfère un contrôle par les commissions permanentes du Parlement. 

Il n'y en aura pas. En conférence de presse mardi matin, le président du groupe Les Républicains à l'Assemblée nationale, Damien Abad, a regretté l'absence de création d'une commission d'enquête au Palais Bourbon après l'annonce par l'Australie de sa décision d'annuler le contrat d'achat de sous-marins français à 56 milliards d'euros au profit de navires américains à propulsion nucléaire. Le député de l'Ain a expliqué que la Conférence des présidents (qui regroupe les présidents des groupes politiques, les présidents des commission permanentes et le président de l'Assemblée nationale) avait décidé de ne pas donner suite à sa proposition de créer une commission d'enquête. 

Le droit de tirage et la Conférence des présidents

Une commission d'enquête parlementaire est un moyen pour les députés d'avoir d'importants pouvoirs d'investigation. Chaque groupe d'opposition peut en créer une par session ordinaire du Parlement grâce à un "droit de tirage" annuel. Sauf que Les Républicains ont déjà utilisé leur droit de tirage en juin pour mettre en place une commission d'enquête sur les dysfonctionnements et manquements de la politique pénitentiaire française, dont les travaux ont commencé en septembre 2021. Et tous les autres groupes d'opposition ont, eux aussi, d'ores et déjà, fait usage de leur droit de tirage. 

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La majorité met en garde contre le "cirque" des commissions d'enquête

"La seule autre solution", explique Damien Abad, aurait été que la conférence des présidents estime, elle-même, nécessaire de créer une commission d'enquête et d'en faire approuver le principe via une procédure d'approbation en séance publique. "Les commissions compétentes, en particulier la commission de la défense, des affaires étrangère et des affaires économiques ont toute latitude pour mener des travaux sur [la crise des sous-marins]. Elles ont d'ailleurs commencé à le faire", ont fait savoir les service de l'Assemblée à l'issue de la conférence des présidents.  

De son côté, la majorité assure que "la transparence sera faite" sur cette crise. Selon Christophe Castaner, le président du groupe La République en marche à l'Assemblée nationale, "les ministres se tiennent totalement à la disposition des commissions parlementaires pour rendre compte de ce dossier." Sur le plateau de France info, le député des Alpes-Maritimes a par ailleurs mis en garde "contre le cirque des commissions d'enquête" qui "n'éclairent pas toujours le débat de fond et mettent en scène certains responsables politiques qui prennent cela comme une tribune."

Sans commission d'enquête, le Parlement peut toujours jouer son rôle

Les commissions permanentes de l'Assemblée nationale ont donc décidé de s'emparer du sujet. Ainsi, les députés de la commission de la défense nationale et ceux de la commission des affaires économiques auditionneront conjointement Pierre Éric Pommellet, le président-directeur général de Naval Group, le 28 septembre prochain. Une audition qui se fera à huis clos, afin de ne pas rendre public des éléments stratégiques, militaires et économiques qui pourraient compromettre le secret Défense.

Dans les prochaines jours, d'autres auditions devraient être organisées. Le président de la commission des affaires étrangères, le député MoDem Jean-Louis Bourlanges, explique notamment qu'il a demandé à recevoir les ambassadeurs français à Canberra et Washington. Après avoir été rappelé à Paris, ce dernier va retourner aux Etats-Unis, a annoncé Emmanuel Macron ce mercredi.

En plus de ces auditions, une mission d'information commune pourrait être constituée. Selon Damien Abad, cette possibilité n'est pas exclue et pourrait satisfaire Les Républicains. "Ça a été évoqué avec une très grande unanimité au sein de la Conférence des présidents, mais il faut mettre au point le dispositif juridique (...) L'essentiel, c'est de savoir comment nous pouvons réagir en tant que Français, en tant qu'Européens, en tant que membres de l'Otan, que ce grand mal serve de rebond à une attitude européenne plus forte. Ce n'est pas gagné, mais c'est ça l'enjeu", résume au micro de LCP Jean-Louis Bourlanges.