Réforme de la Justice : "Il n’y aura aucune fermeture de lieux de justice", martèle Nicole Belloubet

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par Maxence Kagni, le Mardi 6 novembre 2018 à 12:40, mis à jour le Vendredi 28 février 2020 à 09:15

Mardi, la Garde des sceaux a défendu devant la commission des lois la fusion des tribunaux d'instance et des tribunaux de grande instance. La ministre a aussi évoqué une hausse de 24% du budget de la justice sur la période 2018-2022 et la création de 7.000 places de prison d'ici la fin du quinquennat.

La ministre de la Justice Nicole Belloubet a présenté aux députés mardi matin les projets de loi ordinaire et organique "de programmation 2018-2022 et de réforme pour la Justice" et relatif "au renforcement de l’organisation des juridictions".

La réforme a pour but "d'adapter et renforcer" la justice en lui donnant notamment davantage de moyens afin de, selon la Garde des sceaux, "rattraper un retard cruel". Le budget de la justice passera, sur la période, de 6,7 à 8,3 milliards d'euros "hors pensions", "soit une hausse de 24%". "Nous engagerons, durant cette loi de programmation, 6.500 recrutements", a ajouté Nicole Belloubet.

La ministre a aussi évoqué la création de 15.000 places de prison, dont 7.000 devront être livrées d'ici 2022.

7.000 places de prison

"Les efforts budgétaires sont là, certains les trouveront encore sans doute insuffisants et ils n'auront peut-être pas totalement tort eut égard à la situation (dont) nous héritons", a réagi le député MoDem Erwan Balanant.

L'élu Les Républicains Philippe Gosselin a pour sa part mis en cause l'objectif de création de 7.000 places de prison d'ici 2022 :

On sait très bien que cela ne sera pas tenable dans cette mandature pour des raisons de procédure, d'urbanisme, pour des raisons qui tiennent aussi à la commande publique. Donc c'est de la poudre aux yeux.Philippe Gosselin

"Plaintes en ligne"

L'audition a également permis à Nicole Belloubet d'évoquer plusieurs points de sa réforme, comme le développement des "plaintes en ligne" pour "mieux protéger les victimes de violences sexuelles ou conjugales".

La ministre de la Justice a également livré des explications sur l'expérimentation de "tribunaux criminels départementaux" : ceux-ci seront chargés de juger "les personnes majeures accusées de crimes punis de quinze ou vingt ans de réclusion et qui ne sont pas commis en récidive".

Dans un tel cas, les accusés ne seraient donc plus jugés par une cour d'assises mais par "cinq magistrats professionnels". Le but est "d'éviter la correctionnalisation de certains crimes" :

Je pense notamment aux viols. Il faut que les crimes soient jugés comme des crimes.Nicole Belloubet

Nouvelle échelle des peines

La ministre a également présenté la "nouvelle échelle des peines" :

  • En dessous d'un mois : la peine de prison ferme est interdite
  • Entre un et six mois : la peine s'exécutera "par principe" en dehors d'un établissement de détention
  • Entre six mois et un an : le tribunal choisit entre la détention ou l'aménagement de peine
  • Au-delà d'un an : pas d'aménagement possible ab initio (c'est-à-dire avant que la peine ne soit purgée en partie)

"Fracture territoriale"

Nicole Belloubet a également défendu la fusion des tribunaux d'instance et des tribunaux de grande instance, réaffirmant qu'il n'y aurait "aucune fermeture de lieux de justice".

Mais ces mots n'ont convaincu ni le député LR Jean-Louis Masson, qui craint que cette réforme ne soit "qu'une étape", ni l'élu communiste Sébastien Jumel, qui évoque un "risque de creuser la fracture territoriale".

Lors de son audition, Nicole Belloubet a demandé aux députés de revenir à "l'ambition initiale" de son texte, modifié en octobre par le Sénat. Les membres de la majorité auront l'occasion de le faire dès mercredi matin, lors de son examen par la commission des lois de l'Assemblée nationale.

Le débat dans l'hémicycle devrait débuter, quant à lui, le lundi 19 novembre.

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