Variant Omicron : Jean-François Delfraissy "s'attend à une diminution de la sensibilité des vaccins"

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Jean-François Delfraissy, le 1er décembre 2021
par Maxence KagniJason Wiels, le Mercredi 1 décembre 2021 à 12:36, mis à jour le Mercredi 1 décembre 2021 à 14:53

Le président du conseil scientifique Covid-19, auditionné mercredi 1er décembre à l'Assemblée nationale, a dit s'attendre à une baisse de la protection des vaccins actuels face au variant Omicron, tout en soulignant l'importance d'une troisième injection pour lutter contre la cinquième vague de l'épidémie "liée au variant Delta".

"La vraie vague liée au variant Delta [survient] maintenant." Jean-François Delfraissy, président du conseil scientifique Covid-19, a été auditionné mercredi 1er décembre par la commission des lois de l'Assemblée nationale. Interrogé à propos de la résurgence de l'épidémie, le professeur a prôné "un plus grand nombre de vaccinations" et un respect accru des gestes barrières. "Il n'y a pas de solution miracle", a indiqué l'infectiologue.

Dose de rappel

"La vaccination est un élément essentiel", a martelé le président du conseil scientifique : "les vaccins font le job" contre les formes sévères et graves de la maladie. Mais la protection "diminue au fur et à mesure du temps", notamment chez les personnes les plus âgées et "probablement chez les sujets jeunes".

La transmission du virus est réduite d'environ 70% après la vaccination. Mais ce chiffre baisse rapidement, "y compris chez les sujets jeunes" : "Il y a une diminution au bout de six mois, et peut-être de sept", pour atteindre le taux de 30%, a expliqué Jean-François Delfraissy.

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Le président du conseil scientifique Covid-19 défend donc la nécessité d'effectuer un rappel vaccinal, c'est-à-dire une troisième dose de vaccin : "La réponse immunologique est boostée de manière très importante, multipliée par sept ou dix." En plus de limiter à nouveau la survenue de formes sévères, "on récupère également une partie de l'efficacité des vaccins sur la transmission". Le professeur, qui estime que les plus de 50 ans et les personnes à risques doivent être prioritaires, ne sait toutefois pas à ce stade combien de temps dureront les effets de la troisième dose.

Des modèles dépendants des comportements

La communauté scientifique a aussi fait des progrès sur la modélisation des vagues successives depuis le début de la pandémie. Le taux d'occupation des lits d’hôpitaux peut être prédit à court terme avec une marge d'erreur inférieure à 10%, a expliqué aux députés Simon Cauchemez, membre du conseil scientifique. "Malheureusement, tous les modèles s'accordent à dire qu'il va y avoir une croissance des hospitalisations", a prévenu l'épidémiologiste. Mi-décembre, les entrées quotidiennes à l'hôpital dépasseraient ainsi les 1000 patients et le nombre de personnes en soins critiques la barre des 3000.

Parmi les scénarios à moyen terme projetés sur cette cinquième vague, le plus favorable combine une injection massive des doses de rappel pour les plus de 12 ans et un changement de comportements des Français (télétravail, gestes barrières, etc.) : "Avec 10% de réduction des contacts, donc pas dans une dimension extrême, cela peut avoir un impact considérable sur cette vague", note-t-il. En revanche, le scénario le plus pessimiste, avec peu ou pas de rappel vaccinal, anticipe "des niveaux d'hospitalisation qui atteindraient ceux de la deuxième vague".

Variant Omicron

Jean-François Delfraissy a également réagi à l'arrivée "inéluctable" du nouveau variant Omicron en France. "Elle va se faire probablement avec un certain temps", a expliqué l'infectiologue, qui a évoqué une période de "plusieurs semaines". Le président du conseil scientifique Covid-19 a par ailleurs affirmé que l'on ne sait pas "à ce jour" si ce variant est plus transmissible que le variant Delta. Le variant Omicron serait toutefois plus résistant vis-à-vis des anticorps monoclonaux mais aussi vis-à-vis des vaccins.

L'infectiologue a fait part de son "inquiétude" : "On s'attend raisonnablement à une diminution de la sensibilité et de la protection des vaccins", a-t-il estimé, précisant que l'"on ne sait absolument pas à quel niveau cela va se situer". Toutefois, deux nouveaux médicaments, "directement dirigés contre le virus, des antiviraux à action directe" pourront aider "s'ils sont pris de façon précoce". 

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Gestes barrières

Jean-François Delfraissy a appelé à "serrer un petit peu les boulons" vis-à-vis du respect des gestes barrières "pour éviter de revenir à des contraintes beaucoup plus fortes". L'infectiologue a également tenu à indiquer qu'"une partie non négligeable des personnes qui vont s'infecter maintenant vont être des personnes vaccinées" : "Ce n'est pas un échec du vaccin", a martelé le président du conseil scientifique Covid-19, puisqu'il y a beaucoup plus de personnes vaccinées en France que de personnes non vaccinées. "Le risque de se retrouver en réanimation ou de décéder du Covid-19 est dix fois plus important chez les non-vaccinés", a souligné le professeur, qui n'a pas écarté la possibilité de réaliser une quatrième dose dans quelques mois.

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Interrogé par plusieurs députés sur la pertinence de l'obligation vaccinale, Jean-François Delfraissy doute de l'utilité de cette mesure : "Est-ce qu'on doit nous priver d'une certaine forme de liberté ?", a-t-il répondu. Au-delà du principe, il reste sceptique sur le fait qu'une obligation puisse vaincre les réticences des anti-vaccins. Avant d'indiquer que "l'immense majorité des grandes démocraties n'est pas rentrée dans l'obligation."

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