Superprofits, repas étudiants, lutte contre les violences intrafamiliales... : les députés socialistes mettent leurs thèmes à l'ordre du jour

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par Léonard DERMARKARIAN, le Lundi 30 janvier 2023 à 12:15, mis à jour le Mercredi 1 février 2023 à 10:29

Jeudi 9 février, le groupe Socialistes et apparentés défendra huit propositions dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, dans le cadre de sa journée d'initiative parlementaire. Tour d'horizon des textes inscrits à l'ordre du jour la semaine prochaine à l'occasion de leur examen au sein des commissions compétentes demain, mercredi 1er février. 

Ils ont souhaité la reporter pour débattre plus longuement de la réforme des retraites, mais n'y sont pas parvenus : jeudi 9 février aura bien lieu la journée d'initiative parlementaire des députés socialistes, de neuf heures à minuit.

Les 31 députés "Socialistes et apparentés" défendront huit textes : six propositions de loi, une proposition de résolution et une proposition de loi constitutionnelle. 

Taxation des superprofits : bis repetita ?

Parallèlement à la mission "flash" sur le sujet en septembre dernier, les députés socialistes avaient déposé, avec les autres groupes de Nupes, une procédure de référendum d'initiative partagée (RIP) sur la taxation des superprofits. Mais en octobre, le Conseil constitutionnel avait jugé cette initiative "non conforme" à l'article 11 de la Constitution. 

Quelques mois plus tard, le groupe présidé par Boris Vallaud revient donc à la charge avec une proposition de loi, sans passer par la case référendum. Si l'exposé des motifs est légèrement différent de la rédaction de septembre, le texte qui sera discuté en commission des finances mercredi (disponible ici), est identique dans son article unique. Il prévoit l'établissement d'une "contribution additionnelle sur les bénéfices exceptionnels des grandes entreprises" jusqu'à la fin de l'année 2025. L'objectif, selon la proposition de loi, est de faire contribuer davantage les entreprises aux "grands investissements nécessaires" pour la transition écologique, ainsi que pour contribuer au financement des services publics touchés par un "affaiblissement structurel".

Elle concernerait, de manière graduelle, les entreprises ayant réalisé un chiffre d'affaires "supérieur à 750 millions d'euros" ; un seuil, retenu par l'OCDE ou l'Union européenne, qui est quinze fois supérieur au chiffre d'affaires annuel retenu par l'INSEE dans sa définition des petites et moyennes entreprises. De l'autre côté du spectre, ce seuil représente 240 fois moins que le chiffre d'affaires réalisé par Total Energies en 2021, selon Le Monde.

La contribution additionnelle serait imposée pour les entreprises ayant réalisé un "bénéfice exceptionnel" 1,25 fois supérieur à celui réalisé en moyenne sur les années 2017, 2018 et 2019. Cette contribution serait graduelle (20%, 25% ou 33%) et établie sans effet rétroactif : autrement dit, si elle était adoptée en 2023, seuls les exercices 2023, 2024 et 2025 seraient concernés par la mesure. Si la proposition de loi était adoptée, il est prévu, afin d'en assurer le suivi et établir un bilan, un rapport intermédiaire du gouvernement remis au Parlement en 2023 et un rapport définitif remis en juillet 2026.

Outre-mer : commission d'enquête sur la "vie chère"

Le deuxième texte examiné le 9 février sera une proposition de résolution visant à créer une commission d’enquête sur le coût de la vie dans les départements et régions d’Outre-mer. Denrées alimentaires 38% plus chères en Martinique qu'en métropole, prix de l'Internet en moyenne 35% plus cher... : l'exposé des motifs de la proposition de résolution (disponible ici) égrène quelques exemples sur la "vie chère" dans les Outre-mer.

Pour Johnny Hajjar, député socialiste de la Martinique, auteur d'un rapport budgétaire sur le sujet dans le cadre du projet de loi de finances 2023 et rapporteur de la proposition, cette commission d'enquête permettrait une "appréciation objective, globale et détaillée" du phénomène, afin de proposer, dans un second temps, des mesures en la matière. 

Étudiants, EDF, lutte contre les violences intrafamiliales... 

La journée d'initiative parlementaire des députés socialistes comportera d'autres propositions de loi, visant notamment à améliorer les conditions de vie des étudiants, particulièrement dégradées depuis la crise sanitaire. Sur ce dernier sujet, l'exposé des motifs de la proposition de loi indique qu'en 2020 "43% des étudiants ont renoncé à un repas dans la journée pour des raisons financières". Afin de garantir le droit des étudiants à "une alimentation adéquate", le texte rapporté par Fatiha Keloua Hachi propose de rétablir la généralisation des repas à 1 euro dans les restaurants universitaires, à laquelle le gouvernement avait mis fin, malgré les critiques, à la rentrée universitaire de 2021. La mesure serait financée par une augmentation des taxes sur les prix du tabac.

Le quatrième texte de la journée d'initiative parlementaire socialiste concernera l'entreprise EDF. Alors que le gouvernement a décidé la reprise de 100% du capital du groupe par l'Etat, la proposition de loi rapportée par Philippe Brun vise à opérer une "vraie renationalisation" en faisant d'EDF un "groupe public unifié" (contraire à la création de trois entités différentes envisagée par le projet Hercule, officiellement annulé) et à rendre son capital "incessible". En novembre dernier, le député socialiste avait interrogé le gouvernement sur le sujet.

Par ailleurs, les députés socialistes défendront deux propositions de loi destinées à renforcer la lutte contre les violences intrafamiliales et les violences conjugales. Comme l'indiquait la députée Isabelle Santiago au micro de LCP la semaine dernière, le premier texte (disponible ici) vise à "protéger et accompagner les enfants victimes et co-victimes de violences intrafamiliales" en rendant automatique dans certains cas la suspension ou le retrait de l'autorité parentale du parent violent. Le deuxième texte (disponible ), défendu par la députée Cécile Untermaier, vise à "renforcer l'ordonnance de protection", en favorisant la délivrance de celle-ci et en doublant sa durée, afin d'assurer une meilleure protection aux personnes victimes de violences conjugales et intrafamiliales.

Deux ambitions : adoption(s) et mise à l'agenda

Selon l'ordre du jour des prochaines séances (la "feuille verte") validé par la Conférence des présidents, la journée d'initiative parlementaire du 9 février s'ouvrira par l'examen de la proposition de loi relative à la taxation des superprofits. Elle se poursuivra ensuite par l'examen de la proposition de résolution sur les Outre-mer, puis par la généralisation des repas à 1 euro.

Si les députés socialistes ont bon espoir de voir toutes leurs propositions être examinées, grâce à plusieurs textes courts à article unique, celles qui figurent en fin de liste pourraient, selon l'avancée des débats, ne pas être discutées, le temps imparti aux niches parlementaires dans l'hémicycle étant limité à une journée allant de 9h à minuit. Il en ira ainsi, par exemple, du huitième et dernier texte, une proposition de loi constitutionnelle "visant à créer un Défenseur de l'environnement", sur le modèle du Défenseur des droits.

De source parlementaire, à ce stade, le groupe "Socialistes et apparentés" espère notamment qu'une majorité puisse se dégager en faveur de la création de la commission d'enquête sur la vie chère dans les Outre-mer, ainsi que sur les propositions relatives à la lutte contre les violences conjugales et intrafamiliales. 

Au-delà des textes qui seront adoptés, ou pas, cette journée d'initiative parlementaire sera pour le groupe l'occasion de mettre en avant certaines de ses priorités, afin de susciter le débat et de faire avancer la réflexion sur ces sujets. Qu'il s'agisse des superprofits, des conditions de vie des étudiants, ou encore de la lutte contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux. Ce texte, inscrit en sixième position dans l'ordre du jour du 9 février, est le résultat d'un travail commun effectué par Arthur Delaporte, qui en sera le rapporteur, et Stéphane Vojetta (apparenté Renaissance).

Avant d'être débattus en séance publique la semaine prochaine, ces huit textes seront examinés par les commissions compétentes de l'Assemblée nationale ce mercredi 1er février.