Réforme des retraites : à l'Assemblée, une première journée entre bataille d'idées et de procédure

Actualité
par Soizic BONVARLETMaxence Kagni, Raphaël Marchal, Léonard DERMARKARIAN, le Lundi 6 février 2023 à 15:45, mis à jour le Mardi 7 février 2023 à 13:37

Les députés ont entamé l'examen du projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale, qui prévoit notamment le report de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans. La motion de rejet de La France insoumise et la motion référendaire du Rassemblement national ayant été rejetées, l'examen des articles de la réforme des retraites et la bataille d'amendements ont commencé. 

La première séance consacrée à l'examen de la réforme des retraites aura tenu ses promesses. Des oppositions déterminées, un gouvernement non moins résolu, l'hémicycle a été, lundi 6 février, le théâtre d'une bataille d'idées et de procédure qui en disent long sur l'intensité des débats qui vont se jouer pendant les deux semaines à venir dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. 

Si le coup d'envoi de cette séance inaugurale a été donné à 16h, les députés n'ont amorcé l'examen des amendements que peu avant la suspension du soir, à minuit. Auparavant, deux motions de procédure, ainsi que quelques rebondissements, ont en effet émaillé la séance. 

Motion de rejet et motion référendaire rejetées 

La séance s'est ouverte par plusieurs rappels au règlement des oppositions, suite au dépôt d'une motion référendaire commune du groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires (LIOT) et des groupes de la Nupes. Les signataires de cette motion réclamaient la réunion d'une Conférence des présidents, afin de procéder à un tirage au sort incluant cette nouvelle motion, suite à celui qui, la semaine dernière, avait départagé les deux motions référendaires émanant des groupes de la Nupes et du Rassemblement national, en faveur de ce dernier.

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"Vous réclamez un nouveau tirage au sort. Je vous indique que conformément à ce que nous faisons pour les motions de rejet, nous ne referons pas de tirage au sort", a fait valoir la présidente de l'Assemblée nationale, qui s'est dite "très surprise" des accusations portées par l'opposition relatives à un prétendu "déni de démocratie". Une fin de non-recevoir qui a suscité un regain de protestations dans l'hémicycle, empêchant dans un premier temps le ministre du Travail, Olivier Dussopt, de s'exprimer au nom du gouvernement pour présenter la réforme devant la représentation nationale.

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Une suspension de séance et quelques rappels au règlement plus tard, le ministre a finalement pu prendre la parole à la tribune pour défendre une réforme "de progrès" bien que "difficile".

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"Nous examinons une réforme des retraites haïe par 80% des Français, 93% des actifs. Mais vous souhaitez passer en force", a dénoncé en réponse Mathilde Panot qui défendait la motion de rejet préalable déposée par La France insoumise. Mise aux voix, cette motion a été repoussée par l'Assemblée nationale. 

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Repoussée aussi, la motion référendaire du Rassemblement national, dont la présentation et le vote ont été boycottés par les députés de la Nupes. Sébastien Chenu, défendant la motion à la tribune, a exhorté tous les députés hostiles à la réforme à voter cette motion afin de "donner la parole au peuple". Sans succès, donc. 

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Un fait de séance a, par ailleurs, suscité un certain émoi dans l'hémicycle, Marine Le Pen ayant dénoncé une "manœuvre" visant à "empêcher" des élues de son groupe de tenir leur place dans l'hémicycle à un moment stratégique. "Quatre ou cinq de nos députées femmes viennent de recevoir un message leur indiquant qu'un de leurs enfants est à l'hôpital", a-t-elle indiqué. Des messages malveillants et mensongers qui auraient eu pour objectif de faire sortir les députées concernées de l'hémicycle au moment de l'appel des noms des signataires de la motion référendaire, ce qui aurait eu pour effet d'empêcher la présentation de celle-ci, comme le stipule le règlement de l'Assemblée nationale. Marine Le Pen a annoncé déposer plainte pour que vérité sur l'origine de ces messages soit faite. 

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"Extrémistes" contre "populistes de tous bords"

Après cette série de rebondissements, la discussion générale s'est finalement tenue dans une ambiance tendue. Réitérant l'accusation qu'il avait portée la semaine dernière en commission des affaires sociales, François Ruffin (La France insoumise) a qualifié les défenseurs de la réforme d'"extrémistes". "Vous faites pitié", a-t-il aussi lancé à l'endroit du gouvernement et des membres de la majorité. Et d'ajouter : "Bientôt vous serez balayés, emportés par une histoire redevenue tragique, par une histoire qui va basculer dans le cauchemar, ou dans l'espoir. (...) Nous sommes là nous, pour que l'histoire bascule vers l'espoir". 

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Charlotte Parmentier-Lecocq (Renaissance) a, quant à elle, fustigé les "populistes de tous bords" qui "tentent de faire croire aux Français qu'il détiennent la solution magique", avant d'admettre un "défi" à relever pour convaincre "les Françaises et les Français". Enfin, Thibault Bazin (Les Républicains) a concédé "des avancées incontestables" portées par la réforme, tout en estimant qu'en l'état, "le compte n'y [était] pas pour tous".

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En fin de soirée, les députés ont débuté l'examen du texte lui-même, avec plusieurs amendements de suppression de l'article liminaire qui se fonde sur la loi de programmation des finances publiques, rejetée par la représentation nationale en décembre dernier. L'issue du vote sur ces amendements de suppression sera à l'ordre du jour de la prochaine séance qui aura lieu mardi 8 février, après les questions au gouvernement.