Rabais sur le carburant : "500 millions d'euros, c'est déjà beaucoup d'argent", estime le patron de TotalEnergies

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Siège de TotalEnergies (B. Polge / H. Lucas - AFP)
par Jason Wiels, le Mercredi 21 septembre 2022 à 12:17, mis à jour le Mercredi 21 septembre 2022 à 16:42

Auditionné par la mission flash de l'Assemblée nationale sur les profits exceptionnels des entreprises pétrolières, gazières et maritimes, le PDG du groupe TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a dévoilé des bénéfices en hausse cette année pour son activité de raffinage en France. A ce stade, la ristourne à la pompe a coûté 171 millions d'euros à l'entreprise, encore loin des 500 millions d'euros affichés. 

Le contribuable TotalEnergies paie-t-il sa juste part au Trésor public ? L'audition, mercredi 21 septembre, du géant pétrolier français était un rendez-vous attendu dans le débat sur les "superprofits" qui anime l'Assemblée nationale. Face à la tentation de taxer plus des entreprises qui profiteraient de la hausse des cours de l'énergie, une mission flash corapportée par Manuel Bompard (La France insoumise) et David Amiel (Renaissance) fait actuellement l'état des lieux de la situation.

Interrogé par les députés, Patrick Pouyanné a dit "ne pas savoir définir un surprofit". Pourtant, le groupe qu'il dirige va payer un montant record d'impôts dans le monde cette année, estimé à "30 milliards de dollars". C'est près du double du montant acquitté en 2021 et la traduction fiscale directe de la flambée des cours des matières premières.

Pour autant, l'essentiel de cette manne budgétaire ne finira pas dans les caisses de l'État français : "La rente pétrolière ou gazière est captée par les pays où nous exploitons les ressources naturelles et c'est donc là que nous payons l'immense majorité de nos impôts et taxes", a d'emblée précisé le numéro 1 du groupe.

Selon lui, les excellents résultats de l'entreprise sont liés à la fois aux prix du marché et aux investissements passés de l'entreprise, qui lui permettent d'atteindre l'équilibre quand le baril de pétrole dépasse les 25 dollars. À environ 100 dollars le baril depuis le début de l'année, il est facile de comprendre pourquoi l'entreprise affiche un résultat net record de 10,6 milliards de dollars sur les six premiers mois de 2022 :

Un rabais très demandé

En France, TotalEnergies contribue chaque année aux finances publiques françaises à hauteur de "1,6 à 1,9 milliard d'euros", a expliqué Patrick Pouyanné. Un montant qui agglomère tant les impôts que les taxes, ainsi que les "cotisations patronales" payées par l'entreprise. 

La contribution sera-t-elle plus importante en 2022 ? L'activité nationale du groupe se divise principalement entre le raffinage et la distribution. Côté raffinage, TotalEnergies devrait afficher cette année un résultat positif de 600 millions d'euros, une bonne nouvelle pour une branche traditionnellement déficitaire. En revanche sur la distribution, Patrick Pouyanné explique que le bouclier tarifaire mis en place par l'État se traduit par "des pertes relativement importantes".

En fait, c'est le "surplus du raffinage qui finance l'opération rabais", a-t-il résumé. La remise de 10 centimes à la pompe décidée au printemps et renouvelée à l'été dans les quelque 3300 stations-services du groupe a été doublée pour les mois de septembre et octobre. Cette "initiative", prise aussi sous la pression de l'exécutif pendant les débats sur la loi pouvoir d'achat, a coûté pour l'instant "171 millions d'euros depuis le début de l'année" à l'entreprise, avec des volumes de vente en forte hausse.

Le gouvernement et TotalEnergies avaient communiqué de concert pour dire que cette ristourne de 20 centimes, prévue pour durer jusqu'à fin octobre avant de passer à 10 centimes, pourrait coûter jusqu'à "500 millions d'euros" à l'entreprise. Une somme qui n'est donc pour pas encore atteinte si l'on s'en fie aux chiffres donnés par le PDG lui-même, et sur laquelle il a tout de même insisté :

C'est une contribution directe au pouvoir d'achat. 500 millions d'euros, c'est déjà beaucoup d'argent. Patrick Pouyanné, le 21 septembre 2022

La Réunion mise à l'écart

L'audition a aussi permis d'éclaircir pourquoi les habitants de La Réunion ont été privés de la remise de TotalEnergies dans ses stations. Interrogé par la députée Karine Lebon (Gauche démocrate et républicaine), le patron a répondu que cela avait été décidé "à la demande du gouvernement". Les stations-services indépendantes locales auraient vu d'un très mauvais oeil la ristourne, et l'exécutif aurait souhaité calmer le jeu.