Pouvoir d’achat : les socialistes veulent expérimenter un "revenu de base"

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Couverture : Pouvoir d’achat : les socialistes veulent expérimenter un "revenu de base"
par Maxence Kagni, le Mercredi 9 janvier 2019 à 11:45, mis à jour le Jeudi 19 mars 2020 à 15:32

Les députés PS ont déposé une proposition de loi visant à expérimenter pendant trois ans une prestation sociale unique qui remplacerait la prime d'activité, le RSA et les aides au logement. Ce revenu ne doit pas être confondu avec le "revenu universel" prôné par Benoît Hamon ou le "revenu universel d'activité" proposé par Emmanuel Macron.

Face à "l'une des plus graves crises sociales que la France ait connues depuis l'après-guerre", les députés socialistes proposent de tester pendant trois ans, dans certains départements volontaires, la mise en oeuvre d'un "revenu de base".

"Complément de ressources"

Ce dispositif, qui doit se substituer à plusieurs prestations sociales déjà existantes, est selon son rapporteur, le député "Socialistes et apparentés" Hervé Saulignac, "un élément de réponse à la crise des gilets jaunes".

"Cette expérimentation est une nouvelle façon de combattre la pauvreté, mais aussi de concevoir l'incitation au travail", assure le député de l'Ardèche.

Le revenu de base, écrivent les socialistes dans leur proposition de loi, doit constituer un "complément de ressources" visant à "améliorer le pouvoir d'achat" des "nombreux travailleurs [qui] ne parviennent pas à tirer un revenu décent de leur activité". Sont notamment concernés les agriculteurs, les artisans, les employés et ouvriers à bas revenus, ou encore les travailleurs à temps partiel.

Il doit également permettre de "valoriser les activités d'utilité sociale", comme les reconversions professionnelles, les formations longues, le bénévolat et la création d'activité.

Deux ou trois prestations remplacées

Concrètement, ce revenu de base pourrait revêtir deux visages :

  • Il pourrait se "substituer" au revenu de solidarité active (RSA) et à la prime d'activité.
  • Ou englober le revenu de solidarité active (RSA), la prime d'activité et les aides au logement.

Il reviendra aux départements volontaires de choisir la version qui leur convient le mieux.

Quel montant ?

"Le montant forfaitaire de la prestation, la nature des ressources prises en compte pour son calcul ainsi que ses modalités de calcul seront définis par décret en Conseil d’État", précise l'article 2 de la proposition de loi.

"Les modalités de calcul retenues devront permettre une incitation à la reprise de l'emploi", décrit le texte. Hervé Saulignac ajoute que le versement du revenu de base ne devra pas entraîner "des pertes" sur le montant des prestations sociales déjà perçues par les bénéficiaires.

L'expérimentation pourrait toucher 60.000 personnes et coûter 7,5 millions d'euros par an à l’État et aux départements.

Un versement automatique

Le revenu de base serait versé "sous conditions de ressources" et serait "dégressif" en fonction des revenus d'activité des bénéficiaires. "Le revenu de base s'adaptera en temps réel" à la situation des bénéficiaires, ajoute Hervé Saulignac.

Les socialistes veulent également qu'il puisse être versé dès l'âge de 18 ans. Une nouveauté pour les 18-24 ans, car il sont "pour l'essentiel exclus du RSA" ce dernier étant réservé, sauf exceptions, aux personnes d'au moins 25 ans.

Enfin, son versement serait "automatique", c'est-à-dire qu'il n'y aurait pas besoin d'effectuer de démarches spécifiques pour y avoir droit : une manière d'"intégrer" les personnes qui ne recourent pas aux prestations sociales auxquelles elles ont pourtant droit.

Un dispositif à différencier du "revenu universel d'activité" d'Emmanuel Macron

La proposition des socialistes ne doit pas être confondue avec la volonté présidentielle de mettre en œuvre un "revenu universel d'activité". Le chef de l’État souhaite "fusionner le plus grand nombre possible de prestations", dans un dispositif "dont l’État sera entièrement responsable".

Selon Le Monde, cette future allocation unique pourrait voir le jour en 2020. Elle sera, et c'est la grande différence avec la proposition socialiste, soumise au respect de règles strictes : les bénéficiaires auront certes une "obligation d'inscription dans un parcours d'insertion" mais ce dernier les "empêche[ra] de refuser plus de deux offres raisonnables d'emploi ou d'activité figurant dans [leur] contrat".

Le revenu de base des socialistes, quant à lui, n'est pas conditionné à la recherche d'un emploi. Néanmoins, "cela ne veut pas dire que la question ne se pose pas", explique Hervé Saulignac, qui ajoute que "l'expérimentation sera assortie d'un accompagnement fort" des bénéficiaires.

Pas le revenu universel

Par ailleurs, le revenu de base n'est pas non plus le revenu universel d'existence (RUE) défendu pendant l'élection présidentielle par Benoît Hamon.

"Ce n'est pas la même approche, pas le même travail", analyse Hervé Saulignac. Comme l'expliquait à l'époque Le Monde, l'ancien député des Yvelines avait souhaité, au début de sa campagne électorale, mettre en place un revenu universel d'existence (RUE) de 750 euros par mois, versé à "toute personne majeure" sans tenir compte de ses revenus.

"Je n'ai pas toujours compris ce que Benoît Hamon voulait faire, son RUE a pas mal évolué pendant la campagne", ajoute-t-il avant de vanter le "dispositif très carré, stable" du revenu de base, appuyé par des simulations de l'Institut des politiques publiques.

Calendrier

La proposition de loi devrait être étudiée en séance publique à l'Assemblée nationale le 31 janvier. Si elle est votée, scénario peu probable, elle devra être mise en œuvre "au plus tard le 1er juillet 2020".

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