"Il n'y aurait pas de contrefaçon s'il n'y avait pas d'acheteurs"

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par Jason Wiels, le Jeudi 25 novembre 2021 à 10:52, mis à jour le Jeudi 25 novembre 2021 à 12:50

Les députés ont voté à l'unanimité jeudi une proposition de loi portée par Pierre-Yves Bournazel (Agir ensemble) et Christophe Blanchet (MoDem) qui renforce l'arsenal juridique pour lutter contre la contrefaçon, à commencer par la création d'une amende forfaitaire de 200 euros en cas d'achat ou de détention de marchandises contrefaites. Le texte, présenté à l'Assemblée dans le cadre de la journée d'initiative parlementaire du groupe Agir ensemble, doit maintenant être examiné par le Sénat.

Ventes illégales de tabac, de produits de luxe mais aussi de jouets ou de médicaments, la France serait devenue en quelques années "vice-champion du monde" des pays touchés par la contrefaçon selon Christophe Blanchet. Pour y mettre un frein, le député MoDem et son collègue Pierre-Yves Bournazel (Agir ensemble) ont fait voter à l'unanimité jeudi une proposition de loi qui prévoit quelques évolutions notables dans la lutte contre ce trafic.

Une amende de 200 euros

Première nouveauté, la création d'une amende pour "sensibiliser" les acheteurs : "Tout achat ou détention de produits contrefaits sera punissable d'une amende forfaitaire de 200 euros, a expliqué Christophe Blanchet dans l'Hémicycle. "Il n'y aurait pas de contrefaçon s'il n'y avait pas d'acheteurs", a-t-il souligné. 

Dans les faits, l'amende devrait d'abord s'appliquer pour les flagrants délits, par exemple lors d'un achat dans la rue. Cette amendement a été inspiré par la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) lors des auditions, afin de permettre de sanctionner plus rapidement ce type de commerce sans passer par la case justice. Selon les cas, le montant de l'amende pourra s'échelonner de 150 à 400 euros.

La vente à la sauvette dans le viseur

Deuxième marchandise contrefaite après les jouets, les cigarettes ont droit à leur propre article dans le texte. Celui-ci autorise la police municipale et les gardes champêtres à agir contre la vente de tabac à la sauvette, une prérogative jusque-là réservée à la police nationale.

Cette nouveauté sera testée à titre expérimentale pendant cinq ans. "La police municipale, sur le terrain, est beaucoup plus réactive. (...) Le travail de la police nationale est de remonter les filières et les réseaux", avait argumenté Pierre-Yves Bournazel en commission, prenant l'exemple du trafic quotidien de cigarettes à Barbès (Paris), dans sa circonscription.

Vers un blocage des vendeurs sur Internet

La proposition de loi veut poser une première pierre dans la lutte contre la contrefaçon en ligne, là où se vendent les volumes les plus importants. 

Après réécriture de l'article 4 par le gouvernement, le texte doit permettre au détenteur du droit de la marque concernée de demander la suspension ou la suppression groupées des noms de domaine ou comptes sur les réseaux sociaux ayant publié des offres de vente de produits contrefaits. Le juge pourra aussi forcer les intermédiaires, soit les hébergeurs ou les plateformes, à mettre en œuvre cette suppression.

Pour Pierre-Yves Bournazel, ce n'est qu'un début afin d'aller "plus vite sur la responsabilisation des plateformes et des réseaux sociaux, qui laissent prospérer malheureusement beaucoup trop de contrefaçon."

Car la vraie bataille se joue au niveau européen. Bruxelles examine en ce moment le "Digital Services Act" qui pourrait permettre, à terme, d'obliger les plateformes en ligne telles qu'Amazon à tracer les vendeurs de produits contrefaits et à s'assurer que leurs offres soient bannies et ne réapparaissent plus, y compris sous un autre nom.