Amélie Oudéa-Castéra veut "sécuriser chacune des dimensions" des Jeux Olympiques

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par Maxence Kagni, le Mercredi 1 mars 2023 à 11:05, mis à jour le Jeudi 2 mars 2023 à 10:58

La ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, Amélie Oudéa-Castéra, a présenté aux députés le projet de loi qui doit permettre d'encadrer l'organisation des JO de 2024. Le texte contient de nombreuses mesures destinées à assurer la sécurité de l'événement, comme l'expérimentation de caméras algorithmiques.

"Nous avons un compte à rebours qui est assez implacable, à moins de 18 mois maintenant des Jeux Olympiques." Mercredi 1er mars, la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a défendu, devant les commissions des lois et des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, le projet de loi "relatif aux Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024". Ces derniers seront respectivement organisés à Paris du 26 juillet au 11 août et du 28 août au 8 septembre de l'année prochaine. 

Le texte, qui a été adopté en première lecture au Sénat le 31 janvier, se donne pour objectif d'assurer la "réussite" de ces Jeux en permettant une "organisation irréprochable", alors que selon les estimations de la maire de Paris, Anne Hidalgo, ce sont près de 15 millions de personnes entier qui devraient se rendre dans la capitale sur la période.

La réussite des jeux est conditionnée à l'impérieuse nécessité d'en sécuriser chacune des dimensions. Amélie Oudéa-Castéra

Caméras et intelligence artificielle

Pour gérer cet afflux de visiteurs, le projet de loi contient plusieurs dispositions liées à la sécurité. Le texte prévoit ainsi que les forces de l'ordre et de sécurité pourront, "à titre expérimental et jusqu'au 30 juin 2025", utiliser des caméras de surveillance dont les images seront analysées par des algorithmes, c'est-à-dire par des intelligences artificielles. Celles-ci seront capables de "détecter, en temps réel, des événements prédéterminés susceptibles de présenter ou de révéler ces risques et de les signaler".

"On parle essentiellement ici de mouvements de foule et d'abandons d'objets", a précisé mercredi le rapporteur du texte, Guillaume Vuilletet (Renaissance). "Il ne s'agit pas de transformer cet événement en laboratoire", a encore expliqué le député, déterminé à "mettre en œuvre des produits qui répondront à un cahier des charges et qui auront été certifiés".

Ces dispositifs pourront être testés dès l'entrée en vigueur de la loi : la Coupe du monde de rugby, organisée en France du 8 septembre au 28 octobre, pourrait donc permettre une première expérimentation. 

Anticipant les critiques, Amélie Oudéa-Castéra a souligné les "très nombreuses garanties mises en place" par l'article 7, qui permet l'usage de ces caméras algorithmiques : "Nous avons suivi à la lettre les recommandations de la Cnil", a souligné la ministre. Ainsi, les caméras ne pourront utiliser "aucun système d'identification biométrique" et ne devront mettre en œuvre "aucune technique de reconnaissance faciale". Les algorithmes ne pourront, par ailleurs, procéder qu'à des "signalements d'attention". Ils ne pourront "fonder, par eux‑mêmes, aucune décision individuelle ou acte de poursuite".

Au cours de son audition, la ministre a reçu le soutien de la droite, Maxime Minot (Les Républicains) indiquant que sa "famille politique a toujours soutenu le progrès en ce qui concerne les moyens alloués aux forces de l'ordre".

Toutefois, l'article 7 n'a pas convaincu l'opposition de gauche, qui y voit un "basculement majeur" et une "ligne rouge" : le député La France insoumise Léo Walter a, par exemple, affirmé que la vidéosurveillance n'entraînait "aucune baisse de la délinquance", avant de dénoncer un dispositif qui "coûte un pognon de dingue".

"Nous ne savons pas aujourd'hui ce qui sera considéré comme comportement 'anomal'", a ajouté Roger Vicot (Socialistes), tandis que Benjamin Lucas (Ecologiste) a évoqué une "surveillance générale automatisée".

Plusieurs députés ont, en outre, mis en cause la durée de mise en œuvre des mesures contenues dans la loi : "Tous les dispositifs mis en place dans le cadre [de ce texte] doivent prendre fin en même temps que les Jeux Olympiques sinon la loi doit changer de nom", a indiqué Jordan Guitton (Rassemblement national). "Nous savons ce que valent les dispositions provisoires et expérimentales", a lui aussi ironisé Léo Walter (LFI). "On a l'impression d'avoir une forme d'acte 2 de la loi de sécurité globale", a encore affirmé Benjamin Lucas (Ecologiste).

Nous avons un peu le sentiment que ce texte est un peu un cheval de Troie. Roger Vicot (Socialistes)

De son côté, Philippe Latombe a indiqué que le groupe Démocrate souhaitait que le texte soit "déféré en amont de sa promulgation au conseil Constitutionnel dans une démarche de transparence du législateur". Une manière de le "purger de tout risque d'inconstitutionnalité".

"Tirer les enseignements"

Le texte de loi prévoit aussi d'augmenter les sanctions en cas d'intrusions sur les aires de compétition. Celles-ci seront punies de 3750 euros d'amende et de 7500 euros en cas de récidive. Une mesure ayant notamment, selon certains, pour objectif de prévenir les actions d'activistes pour le climat, qui ont récemment perturbé le tournoi de tennis de Roland-Garros ou encore le Tour de France cycliste. 

Par ailleurs, "le fait de pénétrer ou de tenter de pénétrer par force ou par fraude en l’absence d’un titre d’accès" dans un stade ou une enceinte sportive sera puni de 3750 euros d'amende. En cas de récidive, la sanction passera à 7500 euros d'amende et 6 mois de prison. L'objectif, cette fois, est de "tirer tous les enseignements des événements survenus en mai dernier au Stade de France ou à Geoffroy-Guichard". 

Les sénateurs ont d'ailleurs complété le texte, en créant une obligation nouvelle : les billets permettant d'accéder aux sites olympiques devront être "nominatifs, dématérialisés et infalsifiables".

Les membres des délégations qui résideront au village olympique, ainsi que les bénévoles, les prestataires (comme les agents de sécurité) qui seront présents dans les stades et dans les "fans-zones" feront l'objet d'une enquête administrative. Lors de son audition, la ministre a d'ailleurs affirmé que l'organisation des Jeux Olympiques nécessitera l'emploi de près de 22.000 agents de sécurité privée : "Il y a d'ores-et-déjà des carences aujourd'hui, on a un effort considérable de recrutement auquel il faut qu'on procède", a insisté Amélie Oudéa-Castéra.

Concernant la sécurisation des autres manifestations culturelles et sportives de l'été 2024, la ministre a défini quatre périodes : 

  • avant le début des Jeux Olympiques, le 26 juillet : l'objectif sera "d'y mettre le maximum de festivals et d'événements culturels".
  • pendant les JO, du 26 juillet au 11 août : la période "sera vraiment dédiée à cette sécurisation des Jeux" avec quelques "petites exceptions" pour "l'arrivée du Tour de France masculin ou pour la finalisation du Festival d'Avignon".
  • entre les JO et les Jeux Paralympiques, du 12 août au 27 août : cette période permettra d'organiser des événéments comme le "Tour de France féminin" ou les férias de Dax et Béziers.
  • pendant les Jeux Paralympiques, du 28 août au 8 septembre : il y aura une "concentration des forces en Ile-de-France" mais certains événéments comme "Rock en Seine" pourront se tenir.

    Des dispositions "expérimentales" ?

    Autre mesure : l'accès aux sites des compétitions pourra être subordonné au passage dans un scanner corporel à ondes millimétriques, comme cela est le cas dans certains aéroports. En cas de refus, le visiteur sera soumis à "un autre dispositif de contrôle" dont il aura "été préalablement informé".

    Le texte contient également des dispositions permettant de mieux lutter contre le dopage, comme la possibilité de procéder à la "comparaison d’empreintes génétiques et à l’examen de caractéristiques génétiques". "Il est très important que dans la foulée de ce que mes prédécesseurs avaient fait (...) notre pays reste vraiment à l'avant-garde de cette lutte anti-dopage", a revendiqué la ministre devant les députés.

    Bientôt une "billetterie populaire" 

    La ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra a annoncé l'acquisition par l’État de près de 400.000 billets qui devraient bénéficier à "la jeunesse", ainsi qu'aux "personnes en situation de handicap", aux fonctionnaires de catégories B et C "impliqués dans l'organisation" des Jeux ou encore à des "bénévoles du mouvement sportif". La ville de Saint-Denis et le département de la Seine-Saint-Denis ont également acquis des billets, afin qu'ils puissent bénéficier à leurs habitants et associations.