Allongement des délais d'accès à l'IVG : le texte poursuit son parcours législatif

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IVG troisième examen en commission
par Soizic BONVARLET, le Mercredi 2 février 2022 à 10:15, mis à jour le Mercredi 2 février 2022 à 16:36

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a une nouvelle fois examiné, mercredi 2 février, la proposition de loi "visant à renforcer le droit à l'avortement". La mesure-phare du texte porté par Albane Gaillot (non inscrite) et Marie-Noëlle Battistel (Socialistes apparentés), consiste à allonger le délai légal d'accès à l'interruption volontaire de grossesse de 12 à 14 semaines.

Et de trois ! Depuis le 30 septembre 2020, date à laquelle la proposition de loi "visant à renforcer l'IVG" a entamé son parcours législatif, c'est la troisième fois que les députés de la commission des affaires sociales se penchent sur le texte avant son examen dans l'Hémicycle mercredi prochain. Le 20 janvier dernier, à l'issue de deux examens du texte à l'Assemblée et au Sénat, la commission mixte paritaire n'était pas parvenue à un accord. La Chambre haute, dont la majorité est à droite, s'oppose en effet à la proposition de loi, et en particulier à l'allongement du délai de deux semaines prévu à son article 1er.

Les députés ont donc procédé à un nouvel examen sur la base du texte adopté en deuxième lecture à l’Assemblée, les sénateurs l'ayant déjà rejeté à deux reprises.

La mesure-phare du texte préservée

"Le droit à l’IVG n’est pas un droit effectif aujourd’hui en France", a déclaré la co-rapporteure du texte, Marie-Noëlle Battistel, en début d'examen. "Plus de 3000 femmes se rendent encore à l’étranger pour accéder à ce droit", a-t-elle ajouté, femmes qui n'ont pas pu avorter au cours de la période légale en France et qui se sont donc rendues dans des pays européens dont les délais pour recourir à l'IVG sont supérieurs.

Si les opposants à l'allongement des délais ont une nouvelle fois avancé l'argument d'un changement de nature du geste médical à la douzième semaine de grossesse, Marie-Noëlle Battistel leur a répondu en citant l'avis du Conseil consultatif national d'éthique (CCNE) rendu le 11 décembre 2020, et qui stipule qu'"il n’existe que peu, voire pas de différence entre 12 et 14 semaines de grossesse". Le CCNE conclue aussi qu'"il n’y a pas d’objection éthique à allonger le délai d’accès à l’IVG de 2 semaines".

Les amendements de suppression de l’article 1er, dont celui qui a été défendu par Valérie Six (UDI et Indépendants), ont été rejetés.

Suppression des 48h de réflexion en cas d'entretien psychosocial

Les opposants à la proposition de loi ont également bataillé contre la suppression du délai de réflexion de 48 heures dans le cadre de l'entretien psychosocial, obligatoire pour les jeunes femmes mineures. Valérie Six, ainsi que Thibault Bazin (Les Républicains), ont évoqué un délai "indispensable", quand les co-rapporteures du textes ont argué qu'il ne s'agissait que d'en lever "l'obligation".

Annie Chapelier (Agir ensemble) a, par ailleurs, fait valoir qu'"il y a toujours un temps qui s’écoule" entre la consultation et l'IVG, qui "ne se passe jamais dans la foulée". "Ce temps-là laisse déjà à la personne la possibilité de changer d’avis", a continué la députée du Gard, pour qui "il existe déjà de facto dans le processus médical ce délai de réflexion".

La mesure de suppression du délai de 48 heures a été adoptée.

La clause de conscience spécifique finalement maintenue

"On sait que la clause de conscience est utilisée en France de manière assez insidieuse", a déclaré Albane Gaillot, pour qui la clause d'exemption médicale spécifique à l'IVG, constitue un frein au droit effectif d'y recourir. Adoptée en première lecture, la suppression de cette double clause de conscience avait été rejetée en deuxième lecture, la majorité, pourtant globalement favorable au texte, s'étant divisée sur cette mesure. Cette fois, c'est même Cécile Muschotti (La République en marche), qui a toujours ardemment défendu le texte du côté de la majorité, qui a formulé l'opposition de son groupe à ladite mesure. "Nous restons cohérents en suivant l'avis du CCNE", a-t-elle ainsi argué, l'instance ayant stipulé dans son avis de décembre 2020 que "la clause de conscience spécifique souligne la singularité de l’acte médical que représente l’IVG" avant de se déclarer "favorable" à son maintien. Les amendements visant à rétablir la rédaction initiale du texte n'ont donc pas été retenus.

Après cet examen en commission, la proposition de loi sera examinée en séance publique le 9 février, puis le 16 février au Sénat. En cas de désaccord entre les deux Chambres, les députés ayant le dernier mot, la lecture définitive du texte est prévue le 22 février à l'Assemblée nationale, peu avant l'interruption des travaux législatifs, le 28 février, pour cause de campagne présidentielle.