Projet de loi agricole : les députés ont adopté un amendement visant à imposer un affichage de l'origine des produits alimentaires

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par Maxence Kagni, le Vendredi 17 mai 2024 à 16:00, mis à jour le Vendredi 17 mai 2024 à 16:17

L'Assemblée nationale a adopté, ce vendredi 17 mai, un amendement au projet de loi d'orientation agricole qui vise à imposer un affichage de l'origine des produits alimentaires sous forme graphique à partir du 1er janvier 2025. Présenté par Richard Ramos (Démocrate), cet amendement n'a pas été soutenu par le gouvernement qui a notamment exprimé des réserves quant à sa conformité avec le droit européen. 

Les députés ont adopté, ce vendredi 17 mai, un amendement au projet de loi d’orientation "pour la souveraineté alimentaire et agricole et le renouvellement des générations en agriculture", présenté par Richard Ramos (Démocrate), visant à instaurer un dispositif d'affichage "sincère" de l’origine des produits alimentaires sous forme graphique. Si le projet de loi est définitivement adopté en l'état, au terme d'un processus législatif qui ne fait que commencer, le dispositif devra entrer en vigueur au 1er janvier 2025.

L'objectif, tel qu'expliqué par le député du Loiret, est de mieux orienter les consommateurs, afin de leur permettre de "jouer clairement la préférence nationale du produit". "Cet amendement [s'adresse] à des coquins, notamment à des produits comme le cordon bleu de Père dodu, [qui affiche] un logo français bleu blanc rouge, un coq français bleu blanc rouge et dedans aucun produit agricole français...",  a-t-il indiqué. 

Le premier critère d'achat, c'est le prix, le deuxième c'est l'origine. Richard Ramos (Démocrate)

Lors de la crise agricole de ce début d'année 2024, certains agriculteurs avaient multiplié les intrusions dans les supermarchés pour vérifier la véritable origine de certains produits étiquetés "made in France", comme des bouteilles de vin, ou encore des pots de miel. Face à la colère, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, avait promis "plus de 10 000 contrôles sur l'origine France des produits avec des sanctions qui pourront atteindre 10% du chiffre d'affaires des industriels ou des distributeurs qui auraient fraudé sur l'origine française des produits agricoles".

L'amendement a été soutenu par les groupes d'oppositions, Delphine Batho (Ecologiste) appelant notamment à "mettre fin à une tromperie" et Julien Dive (Les Républicains) estimant qu'un tel vote permettrait "de montrer que la représentation nationale s'empare de cette question". Manon Meunier (La France insoumise) rappelant, quant à elle, que "nombre de produits étiquetés avec un drapeau français" sont "uniquement transformés en France et pas du tout produits sur le territoire, ce qui est absolument trompeur pour le consommateur". Et de prendre l'exemple du "miel importé de l'autre bout de la planète" qui tire les prix vers le bas pour les producteurs français. 

"Mis en œuvre avec les parties prenantes"

L'amendement demande la construction d'une "méthodologie d'affichage de l’origine des produits alimentaires sous forme de dispositif graphique". Celle-ci devra mettre en avant plusieurs informations : 

  • "Le pays de provenance le plus représenté, la part des matières premières issues de l’Union européenne et la part non-Union européenne et la possibilité, pour la France comme pour chaque pays européen, de faire figurer la part d’origine nationale",
  • le pays de fabrication ou de transformation finale".

Le mécanisme devra être "construit et mis en œuvre avec les parties prenantes économiques et associatives" et devra entrer en vigueur au 1er janvier 2025. L'amendement explique que les modalités d'application de ce dispositif seront "précisées" par décret.

Un enjeu européen, selon Marc Fesneau

L'amendement de Richard Ramos n'a été soutenu ni par la rapporteure Nicole Le Peih (Renaissance), ni par le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau. "La politique en matière d'affichage est en grande partie communautaire et demande donc que nous puissions nous concerter avec nos partenaires au sein de l'Union européenne", a expliqué la rapporteure, tandis que le ministre a averti que le dispositif contraignant proposé par Richard Ramos pourrait être jugé inconstitutionnel car n'étant "pas conforme à la réglementation européenne".

Marc Fesneau a également indiqué que le sujet de l’étiquetage sera évoqué au prochain Conseil européen. En attendant un éventuel accord et sa mise en œuvre, il a proposé aux députés de s'appuyer sur le futur "Origine-score" que souhaite mettre en place la ministre déléguée chargée des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation, Olivia Grégoire. Un dispositif basé sur le volontariat et donc non contraignant.

Anne-Laure Babault (Démocrate) n'a pas non plus soutenu l'initiative de son collègue Richard Ramos. Chargée avec Alexis Izard (Renaissance) d'une mission visant à travailler sur une future "évolution du cadre législatif et réglementaire des lois EGalim", elle estime que c'est dans ce cadre que devront avoir lieu les débats sur l'origine des produits. Des arguments qui n'ont pas convaincu Richard Ramos, qui a maintenu son amendement, malgré ces demandes de retrait : "Faisons en France l'aiguillon de ce qui se passera au niveau européen", a-t-il déclaré.

L'Assemblée nationale poursuit, ce vendredi après-midi, l'examen du projet de loi d'orientation agricole. Le texte, également à l'ordre du jour de l'hémicycle la semaine prochaine, sera soumis à un vote solennel le 28 mai, avant d'être transmis au Sénat.